Les Japonais au Bal

Publié le 20 Juin 2011

Ouvert en 2008, Le Bal, 6, Impasse de la Défense 75018 est un espace très accueillant dédié à la photographie. De mai à août 2011, cette ancienne salle de bal propose Tokyo-E, trois photographes japonais emblèmatiques des années 1960-1990.


Ces trois photographes cherchent la formule incertaine d’une identité japonaise culturellement métissée, sous influence américaine. Deux d'entre eux ont obtenu le Prix Higashikawa, plus haute récompense japonaise pour un photographe.


Keizô Kitajima, né en 1954 à Suzaka (Nagano). Cinq séries réalisées entre 1975 à 1991, sont exposées.

Photographe précoce, son adolescence est marquée par la découverte des travaux précurseurs de Nobuyoshi Araki et de Daido Moriyama. Sensible à la forme narrative très cinématographique du premier et à la critique acerbe de la société contemporaine du second, il revendiquera ces deux filiations.

Privilégiant une vision fragmentée, totalement subjective, tendant vers la capture de l’expérience brute et vers « l’expression pure », l’écriture photographique devient alors fortement contrastée, floue, tremblée, se jouant des répétitions, des superpositions, des appropriations, des ratés.


Yutaka Takanashi est co-fondateur du légendaire magazine PROVOKE en 1968. Revue trimestrielle, Provoke veut apporter un matériau artistique capable de guider la pensée. Selon les fondateurs, les mots avaient perdu leur sens et la force de décrire la réalité. Ce rôle revenait donc aux photographes qui devaient prendre le relais sur le langage. Les images devaient avoir la priorité et même remplacer le langage. Les théories artistiques du groupe Provoke ont permis à une nouvelle génération de photographes de rompre avec les conventions. Il publie en 1974 Toshi-e (« Vers la ville ») un des livres phares de ce mouvement de redéfinition du langage photographique au profit d’une expression plus brute et instinctive du réel.

Initiée un an après la publication de Toshi-e, la série Machi (Ville) présentée au BAL rompt radicalement avec le style flou, contrasté et expressionniste des années Provoke. Yutaka Takanashi se concentre désormais sur l’un des quartiers les plus anciens de Tokyo, Shitamachi, où le monde traditionnel est peu à peu envahi par les signes de la modernité.


Yûkichi Watabe, né en 1924-1993) est un reporter photographe indépendant, il couvre la plupart des grands événements historiques et politiques se déroulant à Tokyo.

En 1958 il se voit accorder l’autorisation exceptionnelle de documenter l’enquête menée par la police municipale de Tokyo relative à « l’affaire du corps coupé » : Le 13 janvier 1958, un nez, deux phalanges et un pénis sont découverts dans un bac à huile à proximité du lac Sembako (préfecture d’Ibaraki). Le lendemain, la police trouve le corps d’un homme de l’autre côté du lac, grossièrement défiguré. Plusieurs doigts sont coupés et l’intégralité du corps est rongée à l’acide, dans le but évident de rendre impossible toute identification.

 

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© Yukichi Watabe, A Criminal Investigation, 1958

 

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© Keizo Kitajima, Tokyo, 1979


Rédigé par nezumi dumousseau

Publié dans #Japon

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