3 films du grand Yasujirô Ozu ressortent en salles

Publié le 17 Mai 2013

Yasujirô Ozu (小津 安二郎) est né voici bientôt 110 ans, le 12 décembre 1903.
Il meurt d'un cancer le 12 décembre 1963, le jour de son 60ème anniversaire, après avoir tourné 54 films. Au milieu des années 1930, il devient l’un des réalisateurs les plus célèbres du Japon, aussi talentueux dans la comédie que dans le drame. Dans un genre comme dans l’autre, il s’attache désormais à traiter de la vie familiale japonaise, témoin des bouleversements sociaux de l’époque. Il place sa caméra à la hauteur des acteurs, et quelque fois même plus bas. On lui doit de nombreux chefs-d'œuvre et il faut saluer l'initiative du distributeur Carlotta, qui ressort en salles et en DVD trois films importants de Yasujirô Ozu :

  • Le Fils unique (inédit en France) (1936) sort le 19 juin 2013
  • Voyage à Tôkyô (1953) le 3 juillet
  • Le Goût du saké (1962) le 3 juillet

 

1936 : Le Fils unique (inédit en France)

À Shinshu, petit village de montagne au centre du Japon, une fileuse de soie élève seule son fils Ryosuke. Bon élève, celui-ci est en âge d’aller au lycée mais la mère s’y oppose car les études sont trop coûteuses. Elle finit néanmoins par accepter, faisant le choix de tout sacrifier pour l’éducation de son fils. Treize années plus tard, Ryosuke s’est installé à Tokyo et sa mère lui rend visite pour la première fois. Malgré les efforts de son fils pour l’accueillir, celle-ci découvre qu’il vit dans une situation précaire, déçu par les promesses de la grande ville

Premier film parlant d’Ozu, Le Fils unique décrit avec un réalisme sombre, quoique peu fataliste, les difficiles conditions sociales du Japon d’avant-guerre. À la fois intime et universel, le récit se déploie sur une quinzaine d’années pour capter une époque charnière, marquée par la fracture entre la vie rurale et l’essor urbain. À travers ce récit de sacrifice et d’illusions perdues, le cinéaste livre une étude sensible du rapport mère-fils, « drame de la vie » comme l’annonce le carton d’ouverture, mais également lien naturel positif puisque la mère encourage le fils à persévérer. Inédit en France, Le Fils unique annonce les oeuvres les plus célèbres du maître (Il était un père, Voyage à Tokyo) et demeure l’un des drames sociaux les plus poignants de Yasujiro Ozu.

 

Un couple de retraités se sent vieillir.
Un matin de juillet, ils décident de quitter leur petit village portuaire et de rendre visite à leurs enfants, établis à Tokyo. Mais ceux-ci les reçoivent plutôt froidement. Seule la veuve de leur second fils, tué à la guerre, Noriko, leur témoigne un peu d'amitié.
Ce film comme la plupart des autres raconte une histoire assez pessimiste et illustre la désagrégation des valeurs familiales et sociales, dans un pays guetté par la modernisation. Critiqué comme réactionnaire par certains, Ozu est en fait un contemplatif, inscrivant de menus faits quotidiens dans le grand livre de l'éternité, et donnant un sens au plus petit détail.  

 

 

1963 : Le Goût du saké ( 秋刀魚の味 Samma no aji)

Le titre original du film, Sanma no aji, fait référence à la scène clé du film, celle du premier repas avec le vieux professeur, qui a sacrifié sa fille à son égoïsme, repas au cours duquel les convives mangent du sanma « congre de mer » . Le sanma est le nom d'un poisson sabre communément consommé mais emblématique, comme l'est le saké.

Un père, veuf et cadre dans une entreprise industrielle vit avec sa fille et son dernier fils. Le soir, après le travail, il retrouve ses amis pour boire du saké dans un café où ils ont leurs habitudes. L'un d'eux lui propose un gendre pour sa fille.

D'abord, cédant à son angoisse de la solitude et à son égoïsme, il nie la nécessité du mariage mais l'évènement devient inéluctable lorsqu'il croise la fille d'un vieil ami qui a sacrifié sa jeunesse pour s'occuper de son père. Il prend alors peu à peu conscience que sa fille est en âge de se marier et qu'il doit, au risque de se retrouver seul, libérer sa fille de son emprise paternelle.

Hirayama, qui prend conscience du malheur qu’il engendre au final à sa fille revient chez lui, il fait face à la solitude qu’il a toujours redouté, pourtant, la vie continue chez Ozu, même si cela implique d’accepter le changement, qu’il soit facile ou difficile à accepter. C’est également Ozu qui doit faire son deuil, car durant le tournage du film, la propre mère du réalisateur décède et lui-même se sait atteint d'un cancer. L’œuvre en devient plus forte et plus personnelle.

Le Goût du Saké se place dans la période de transition d’un Japon en mutation mais dans la nostalgie du temps passé qui donne un sentiment de mélancolie du temps qui passe et de la vieillesse qui s’installe peu à peu chaque jour, comme le petit verre de saké que prennent régulièrement les protagonistes jusqu’à mettre le spectateur face à sa propre vieillesse, à sa propre solitude qu’il faut surmonter. Comme dans les meilleurs films d'Ozu, il s’agit d’un film cadré au millimètre prêt, au rythme apaisant, soutenu par des jeux d’acteurs de grande qualité.

Rédigé par nezumi dumousseau

Publié dans #cinéma, #Japon, #Yasujirô Ozu

Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article